MÉDECINE TRADITIONNELLE AFRICAINE : UN POTENTIEL POUR CONQUÉRIR LE MONDE

 

 

Salon PSAO au Cameroun

Par Jean-Célestin Edjangué

La pharmacopée africaine s’invite au 2ème Salon des Produits et services inspirés de l’Afrique et de l’Outre-mer, qui se déroulera à Douala, la cité économique du pays des Lions indomptables, les 1er et 2 juillet 2022.

Montre-moi ta forêt et je te dirais comment te soigner. Cet adage populaire pourrait bien être africain, tellement le continent regorge de potentialités en matière de biodiversité de plantes et d’herbes médicinales pour améliorer le bien-être de son 1, 3 milliard d’habitants. 

Le fait est connu jusque dans les instances les plus autorisées. « Depuis des générations, la grande majorité de la population africaine compte sur la médecine traditionnelle qui constitue la source principale à laquelle cette population recourt pour combler ses besoins en soins de santé, car il est reconnu que la médecine traditionnelle est fiable, acceptable, d’un prix abordable et accessible ». 

Le constat est du Dr Matshidiso Moeti, Directrice régionale de l’OMS pour l’Afrique. Constat dressé lors de la journée mondiale de la médecine traditionnelle africaine, le 31 août 2021, au plus fort de la « pandémie du siècle ». 

Cette botswanaise, spécialiste en santé publique et administratrice médicale sait de quoi elle parle, ayant observé les bienfaits de la médecine traditionnelle africaine dans la lutte contre le Covd-19.  

« Aujourd’hui, l’on assiste à l’émergence de traitements prometteurs à base de médicaments traditionnels dans le cadre de la riposte à la COVID-19. 

Au Cameroun par exemple, le Ministère de la santé a approuvé deux produits en tant qu’adjuvants dans le traitement de la COVID-19. Le COVID-Organics Plus Curative, remède à base de plantes mis au point à Madagascar, fait actuellement l’objet d’essais de phase III, et des résultats préliminaires encourageants ont été rapportés », ajoutait-elle avant de s’enthousiasmer : « Nous avons hâte de recevoir les résultats définitifs de cet essai et des autres essais pour différents produits qui ont cours dans 12 autres pays africains, notamment en Afrique du Sud, au Nigéria, en Ouganda et en République démocratique du Congo », confiait-elle au plus fort de la « pandémie du siècle ».

5, 88% de prévision de croissance d’ici 2023

Le marché mondial des médicaments à base de plantes est pourtant florissant. Dans son dernier rapport sur la médecine traditionnelle, Market Research Future(MRFR) affirme que « le marché mondial des médicaments à base de plantes devrait atteindre une valeur de plus de 129 milliards dollars US d’ici 2023 avec un taux moyen de croissance annuelle de 5,88% sur la période de prévision 2018 à 2023 ». 

L’étude souligne par ailleurs une nouvelle donne concernant les habitudes de consommation des médicaments qui inciterait à un retour vers les plantes médicinales. « l’utilisation croissante de produits chimiques de synthèse en médecine conventionnelle a déplu à une population importante qui exige de plus en plus des alternatives naturelles. 

Ce changement d’habitude a stimulé la demande de plantes médicinales à travers le monde, y compris dans les régions développées telles que l’Amérique du Nord et l’Europe, ainsi que dans les pays en développement d’Asie Pacifique, d’Amérique latine et du Moyen-Orient et même en Afrique ».

95% de médicaments importés

On aurait pu s’attendre, eu égard à ce potentiel et à l’enthousiasme qu’il soulève, à ce que le berceau de l’humanité soit autonome pour ce concerne la production des médicaments et maximiser ses chances d’atteindre le 3è objectif de développement durable (assurer la santé et le bien-être de tous, en améliorant la santé procréative, maternelle et infantile, en réduisant les principales maladies transmissibles, non transmissibles, environnementales et mentales). 

Que neni ! « Actuellement, le continent africain produit moins de 5 % des médicaments que consomment ses populations alors que 95 % sont importés », révèle un rapport de Proparco publié en 2018 sous le titre «  Le médicament en Afrique: répondre aux enjeux d’accessibilité et de qualité ». Le document met en exergue une situation inégale du continent où des pays comme l’Afrique du Sud et le Maroc parviennent à couvrir 70% à 80¨de leurs besoins pharmaceutiques pendant que d’autres, en Afrique centrale notamment, importent jusqu’à 99% des médicaments dont leurs populations ont besoin. 

En volume, l’Afrique importe plus de 50 milliards de dollars par an. Face à cette réalité, l’OMS a entrepris d’une part de faire le point de la situation concernant la deuxième Décennie de la médecine traditionnelle africaine(période 2011-2020), et surtout d’évaluer les progrès enregistrés dans le cadre de la mise en œuvre de la stratégie régionale pour le renforcement du rôle de la médecine traditionnelle dans les systèmes de santé 2013-2023. 

Il en ressort que 40 pays africains disposent désormais de cadres politiques pour la médecine traditionnelle, contre huit pays en 2000. La mobilisation des communautés pour participer à la sensibilisation sur la valeur de la médecine traditionnelle, le renforcement des  capacités des chercheurs, des tradipraticiens de santé et des autorités nationales de réglementation, à partir des formations, en partenariat avec l’OMS, le CDC-Afrique et le Partenariat Europe-pays en développement sur les essais cliniques, liés aux efforts notables pour conserver les plantes médicinales, ont permis des résultats encourageants. En 2020, une action conjointe entre l’OMS, la Commission de l’Union africaine et le CDC-Afrique a débouché sur la création du Comité consultatif régional d’experts sur la médecine traditionnelle pour la riposte à la COVID-19, facilitant ainsi la recherche dans les pays tout en les aidant à collaborer sur les essais cliniques de médicaments traditionnels dans le respect des aux normes internationales en vigueur. Mais tout cela reste bien insuffisant.

L’édition 2022 du Salon des Produits et Services Inspirés de l’Afrique et de l’Outre-mer (PASO), est l’occasion rêvée pour savoir concrètement sur quels leviers l’Afrique et les Caraïbes peuvent jouer pour développer un secteur d’activité qui ne demande qu’à transformer son potentiel en atout, pour aller à la conquête du monde. Ce sera à Douala, au Cameroun, les 1er et 2 juillet.

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