C’est incontestablement un passionné de l’image autant que des mots, que le public du 2è Salon des Produits et services inspirés de l’Afrique et de l’Outre-mer(PSAO) vont découvrir, avec délectation, les 1er et 2 juillet prochains à Douala au Cameroun.
Gérard Théobald, l’image et les mots au service des causes justes
« Je suis un homme d’origine, un intrus, une personne qui par sa mémoire, par son corps renvoie aux préceptes amers du classement du genre humain, de la domination et de la violence. Mon travail est un refus permanent d’inscrire et d’installer l’Autre dans une catégorie, voire dans une case et de l’enfermer… ». C’est ainsi qu’il décrit son être et son travail.
Producteur-Réalisateur de nombreux documentaires sur le domaine social et politique, auteur d’essais sur la négritude, et fondateur du site 4Tan (www.4Tan.eu) qui traite de la négritude par la photo, le film et le texte, Gérard Théobald est un personnage atypique dans l’univers de la production et réalisation audiovisuelle, comme dans le milieu littéraire afro-descendant, dans l’hexagone et les Outres mers.
Son champ d’exploration, caméra ou plume à la main, concerne à la fois l’histoire coloniale et la culture, la traite, et plus largement la condition humaine. « La conjugaison de ces thèmes structure la mémoire des personnes héritières des Codes noir et de l’indigénat. Cette mémoire a des synonymes : la négritude, la créolisation, la diversité, l’altérité aux fins de « vivre-ensemble » », confie-t-il.
Cette mémoire a aussi pour noms Aimé Césaire, Léopold Sédar Senghor, Mongo béti, Frantz fanon, Sarah Maldoror, la cinéaste, auteur d’une quarantaine de films, décédée le 13 avril 2020, qu’il a bien connu et dont il dépeint un portrait à la fois très touchant et saisissant. « Née en 1929 d’une mère originaire du Gers et d’un père guadeloupéen, Sarah Maldoror s’est éteinte lundi 13 avril 2020. De son vrai nom Sarah Ducados (elle choisira celui de Maldoror en hommage au poète Lautréamont), elle monte à la fin des années 50, après des études à Paris, une compagnie de théâtre nommée « Les griots » et composée d’acteurs venus d’Afrique et des Caraïbes afin de lutter, entre autres, contre les rôles restreints qu’on leur proposait.
La troupe (première compagnie de théâtre noire de France) jouera notamment des pièces d’Aimé Césaire et Jean Genet », écrit-il.
Un réalisateur et auteur engagé
Pour Gérard Théobald, « Ces minorités », vivant en Europe ou en France, sont créatrices de richesses et participent à la modernité de l’Europe via l’exploitation de leurs êtres. Les héritiers, réduits à des préjugés voire à la notion de « produits exotiques », et dans bien des cas, à la notion de « produits exotiques » et à une vision néocolonialiste de l’individu. Pour ce spécialiste de l’image, cette dernière véhicule « un contenu qui ne correspond ni ne convient aux personnes visées par ces concepts.
Aussi, ces personnes sont dépossédées de tout pouvoir et se sentent exclues d’une notion, d’une idée, d’une politique nationale ainsi que de ces propositions. Ce constat éloigne ce public héritier des préoccupations sociales et collectives ». Ainsi donc, Gérard Théobald travaille sur les concepts de l’« Aquis » et « A acquérir ». Deux notions différentes, à ses yeux, l’une de l’autre. « L’ Acquis est ce qui est visible et contenu de la société qui se relate et se formule par le mot fameux du poète Aimé Césaire « Le nègre vous emmerde », utilisé pour se défendre contre le racisme et les discriminations. « A acquérir » est ce qui est de la philosophie et l’avenir de la société qui se relate et se formule par le vocable la « Diversité », qui symbolise la mixité, l’altérité, le « vivre-ensemble » et le partage des cultures. L’ensemble est une mémoire des héritiers des Codes noir et de l’indigénat… ».
C’est donc un homme de l’image autant que de la plume, un auteur, réalisateur et producteur audiovisuel, qui se fera le plaisir de partager ses multiples expériences avec le public, lors du 2è Salon des Produits et Services Inspirés de l’Afrique et de l’Outre-mer, les 1er et 2 juillets 2022 à Douala, au Cameroun.
Lire Gérard Théobald
- Retour au pays des rois nègres, éd. la Perle noire, 2015.
- La liberté est ou n’est pas…Selon Aimé Césaire, éd. Publibook, 2014
- De l’indigène a l’individu, au citoyen : mémoire d’une diversité, éd. Edilivres, 2013
- Le fils du bourreau, éd. Edilivres, 2013.
- L’abolition de l’esclavage, utopie des sociétés modernes, éd. dédicaces, 2012
- La crise de l’Outre-mer français : Guadeloupe, Martinique, Réunion, auteur. Suzanne Dracius, Jean-François Samlog, Gérard Théobald, éd. l’Harmattan, 2009.
Par Jean-Célestin Edjangué